Technique et temporalité

Pour donner vie aux akènes et aux écosystèmes à travers ses œuvres, un premier temps de maturation marque le début du processus créatif de Mathilde Garnier. C’est à l’issue de ce dernier qu’elle pense les formes dominantes de ses dessins et qu’elle agence peu à peu les espèces représentées sur ces derniers. Ses recherches documentaires en botanique font corps avec sa démarche artistique et ponctuent chaque étape du processus créatif. Cette méthodologie, visant en l’alternance entre documentation et réalisation technique, lui permet d’illustrer avec fidélité les relations qui se jouent entre les vivants.


Pour ce faire, elle privilégie les papiers sans acide et compose sur du papier à fibres végétales ou du papier recyclé, selon les techniques de dessin employées et les contraintes qui les accompagnent.
Le support choisi, Mathilde Garnier dresse une esquisse avant de tracer à l’encre de Chine les nombreuses espèces qui peuplent ses œuvres, en se servant de plumes et d’autres stylos conçus pour le dessin technique. Selon leur état d’usure, ces outils lui servent à travailler la profondeur de ses dessins comme leur clair-obscur, en accordant diverses nuances à ses traits. Elle ombre ainsi le contour et le relief des objets qu’elle représente, à l’image d’une graveuse qui ôte de la matière à son support.
En élaborant ses fonds suggérés, elle se sert aussi d’encre de Chine comme de fusain pour leurs pigments. C’est avec de l’eau qu’elle trace ensuite ces derniers, dans l’intention de produire les atmosphères qui gisent en ses œuvres.

Pour parvenir à retranscrire si minutieusement la beauté qu’elle perçoit en la flore, elle travaille à l’aide de diverses lentilles comme le ferait une joaillière. L’usage individuel ou pluriel de ces outils fait partie intégrante de sa technique, il est le moyen d’atteindre les différents niveaux de précision attendus par l’artiste.

À l’œuvre, le dessin de ces nombreux traits cadence la temporalité de Mathilde Garnier. La méticulosité de son tracé est avide de temps. Les moments accordés à la maturation de ses idées comme le format de ses dessins participent à la variabilité de son rythme de production. Dans le cas d’une commande particulière, le temps moyen de réalisation se compte en semaine. L’idée première émanant d’autrui, l’exécution est moins ponctuée de moments dédiés à la maturation du projet. La réflexion autour de ses idées et la recherche documentaire prennent plus d’espace lorsqu’elle travaille sur ses desseins personnels, la réalisation d’une œuvre se compte alors en mois et s’étale davantage dans le temps.

Son évolution dans la réalisation technique de ses œuvres est accompagnée d’un risque croissant. Chaque trait fait l’objet d’une attention particulière à cause du caractère indélébile de l’encre utilisée. Néanmoins, c’est avec tolérance que Mathilde Garnier produit son art, en s’accordant la liberté de modifier ce qui a été préalablement pensé.

© SYHAM – Clément Cézarine, auteur et Rédacteur, www.syham.fr



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